publié le
04/26/2025
écrit par
Dre Yasmin Daradkeh
La Dre Yasmin Daradkeh est vétérinaire de terrain, spécialisée en chirurgie et en médecine vétérinaire internationale. Elle est titulaire d’un master en chirurgie et a travaillé dans des contextes très variés : des cliniques pour petits animaux aux grandes opérations sur le terrain, en passant par la recherche en santé unique. Actuellement doctorante en sciences biomédicales comparées, elle continue de combiner pratique clinique et recherche pour promouvoir des solutions durables et scientifiques en soins vétérinaires.
La profession vétérinaire est à la fois magnifique et exigeante. Elle est incroyablement diversifiée, avec des spécialités entières au sein du domaine, ce qui rend difficile d’en saisir toute l’étendue.
Personnellement, j’ai travaillé en médecine et chirurgie des petits animaux, en médecine des grands animaux, et j’ai participé à des recherches dans le domaine d’Une seule santé (One Health) et des maladies zoonotiques. Si tout cela peut sembler passionnant vu de l’extérieur, il est plus difficile d’expliquer les défis émotionnels, les complications et la charge de travail intense à des personnes d’autres domaines. Le secteur vétérinaire est malheureusement sous-évalué dans de nombreuses régions. Il y a souvent des histoires de travail gratifiantes—mais malheureusement, on rencontre aussi des histoires bouleversantes.
Que faut-il pour s’épanouir en tant que vétérinaire ? Dans cet article de blog, nous allons explorer des moyens de faire face aux exigences émotionnelles de la profession, de donner la priorité au bien-être, et de développer la résilience tout en faisant progresser la santé animale.
Être un vétérinaire passionné par son métier est merveilleux, cela vous rend meilleur dans ce que vous faites. Chaque cas compte, qu’il s’agisse d’un animal de compagnie adoré, d’un animal dans une ferme commerciale, ou d’un animal pouvant transmettre des maladies zoonotiques aux humains. Vous traitez chaque cas comme s’il était le plus important, et bien que cela fasse de vous un excellent vétérinaire, cela s’accompagne aussi d’une charge mentale et d’un sentiment de culpabilité : Ai-je vraiment fait de mon mieux ? Et si ce n’était pas le cas ? Et si j’avais fait les choses différemment, l’animal aurait-il souffert moins ?
De plus, le vétérinaire est souvent présent lorsqu’un propriétaire perd son animal, que ce soit en raison d’une maladie ou de la vieillesse. Même si vous êtes une personne forte, cela finit par vous affecter. Et bien souvent, vous ne pouvez pas l’expliquer aux autres parce que vous ne le comprenez pas entièrement vous-même.
Dans ces moments-là, souvenez-vous que vous n’êtes pas seul. Des vétérinaires du monde entier traversent la même chose. Et en tant qu’humains, il est normal d’admettre que l’on ne va pas bien et que l’on a besoin d’une pause.
Écoutez votre corps : si vous avez besoin de repos, prenez-le. Connectez-vous avec d’autres vétérinaires de votre domaine—ils traversent probablement les mêmes épreuves que vous. Soyez celui ou celle qui ouvre la voie à la communication : cela vous aidera, vous et les autres. Votre santé mentale compte. Vous ne pouvez pas prendre soin des animaux si vous ne prenez pas soin de vous-même. Souvenez-vous pourquoi vous avez choisi cette profession au départ.
Les limites sont des outils essentiels pour tout vétérinaire, surtout en matière d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Si vous êtes vétérinaire, vous savez probablement de quoi je parle : un appel d’une connaissance perdue de vue depuis des années avec une question vétérinaire, ou un client qui vous accoste après les heures de travail avec une avalanche de questions sur son animal.
Même si cela part d’une bonne intention, cela peut être écrasant quand tout ce que vous souhaitez, c’est vous déconnecter du travail et simplement être vous-même. Il est important d’en parler à vos amis. Et si cela n’est pas possible, ou si vous avez peur de blesser quelqu’un, dites simplement que vous seriez ravi d’en discuter le lendemain pendant vos heures de travail.
Et si vous êtes l’ami(e) d’un vétérinaire, sachez que parfois, nous sommes fatigués, et nous voulons parler de notre vie personnelle, pas uniquement de notre travail. Si nous avons besoin d’une pause, ce serait réconfortant de savoir que nous pouvons compter sur vous.
Il est normal de se sentir coupable pour ses patients. Vous êtes humain après tout. Mais souvenez-vous qu’il est aussi normal de laisser cette culpabilité derrière soi. La garder ne fait pas de vous un meilleur vétérinaire, tout comme s’en libérer ne fait pas de vous un moins bon.
Certains cas sont difficiles et s’inscrivent dans notre mémoire. J’ai des souvenirs très nets d’euthanasies que j’ai pratiquées, d’animaux dont la vie s’est arrêtée sur la table. Mais cette même table a aussi vu naître de magnifiques chatons lors de césariennes. Elle porte les souvenirs précieux de visites sur le terrain où des chamelons ont repris du poids après une maladie. Ce sont des cas qui ne se seraient pas améliorés sans mon intervention.
Il est important de garder en mémoire ces instants clés, car ils ont tous leur importance. Dans chacun d’eux, j’ai fait de mon mieux, en utilisant tout mon savoir et mon expérience pour soigner. Certaines expériences, je ne les aurais jamais acquises sans avoir vécu les cas difficiles du passé.
Il y a aussi les moments d’accomplissement, comme un article scientifique qui n’aurait jamais été publié sans le travail acharné d’un vétérinaire, mentalement ou physiquement. Tout cela contribue à une cause plus grande : un monde où les animaux ne souffrent plus à cause de maladies, grâce à la détermination d’un vétérinaire quelque part, qui a fait le travail et sauvé des vies—et continue d’en aider d’autres à le faire.
Au final, les vétérinaires ont l’une des professions les plus imprévisibles et gratifiantes qui soient. Nous portons en nous les histoires joyeuses, les leçons difficiles, et ce sentiment profond de satisfaction en sachant que notre travail change réellement des vies.
Même si nos patients ne peuvent pas parler, s’ils le pouvaient, ils nous diraient combien notre travail a eu un impact durable sur leur existence.
The Animal Echo vise à promouvoir la compréhension individuelle et collective de la santé et du bien-être des animaux. Nous vous présentons des idées et des opinions d’experts en matière de santé et de bien-être des animaux dans le monde entier. Les opinions exprimées dans The Animal Echo sont celles de(s) auteur(s) et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’OMSA.
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